Le saule
Sur le ciel bleu ne se dessinait plus que son tronc desséché surmonté de quelques branches craquantes. Toute sève l'avait quitté.
Toute ? Comment se fait-il alors qu'en un point précis, sous l'écorce, quelques rameaux aient jailli de son passé, s’élançant fièrement de cet arbre que tous considéraient comme mort.
“Ça a la vie dure, un saule”, ont dit certains.
Mais personne n'a su l'effort que lui avait demandé le filet de sève qu'il avait arraché à ses racines pour faire naître à son flanc ces cinq petites branches et les couvrir de feuilles.
Personne n'a su non plus qu'avant de mourir il s'était souvenu d’une sagesse ancienne disant qu'il ne faut laisser sur terre aucune trace de sa souffrance.
Il avait donc décidé durant l'hiver de tirer de lui tout ce qu'il lui restait de vie pour revenir effacer ses blessures en les offrant, par ces frêles rameaux, au souffle du vent, aux caresses de la lumière et à la fraîcheur de la pluie.
Savait-il qu’un homme d'un certain âge, passant par là, s'était arrêté longuement, et ayant écouté l'arbre dans le frémissement des quelques feuilles qu'il avait engendré, avait prit la décision de revenir lui aussi sur les lieux de ses blessures pour effacer de la terre ce qu'elle n'avait pas à porter.