La Toute Vivante (revue )
La cause première de toutes causes
et la cause ultime de toutes choses,
laissez-moi la nommer : la Toute Vivante
Laissez moi croire qu’elle n’a jamais rien désiré
d’autre que l'épanouissement du vivant
depuis la première étincelle parue dans le vide.
Ce plus grand que soi qui transcende tout,
je le pose comme principe féminin.
Trop de temps passé à croire le contraire.
Trop de temps passé à craindre
la mâle puissance d’une entité créatrice
alors que tout n’est que souffle et fragilité.
Changer de genre, mais de nature aussi,
changer de nom pour que s’y inscrive la vie
comme en tout germe, en toute naissance.
La Toute Vivante nous a tous enfanté
pierre, bois, fleurs, animaux, humains
Tous issus des particules du liquide primordial
Le pétale lui doit sa fragile et lumineuse beauté
la roche, sa dureté entêtée de roche,
et le poulain la grâce de sa course.
En son ventre réside le germe
en ses bras réside la tendresse
qui donne au germe le goût de s’élever.
En son sein, se relaient le jour et la nuit
la chaleur et le froid, le sec et l’humide
Elle est de toutes les saisons
Quelque chose de l’été brille en elle,
quelque chose de vif et rayonnant
comme un soleil de midi en juillet
Quelque chose de l’automne, cependant
peut affleurer certains jours
où il lui faut puiser dans ses racines.
Quelque chose de l’hiver l’habite
où elle se retranche parfois
lorsqu’en elle, neige le silence
Mais c’est quelque chose du printemps qui
la plupart du temps se déploie du tréfond
en une force généreuse et créatrice.
Elle a avec le ciel une connivence
qui lui permet d’être ciel elle-même
et d’embrasser toutes les étoiles.
Lors d’enfantements douloureux
elle lui adresse toutes ses larmes
qu’il lui renvoie en gouttes de pluie.
Et chaque fois qu’un souffle s’éteint
elle redistribue les particules inanimées
tout en gardant précieusement l’information.
En elle, toutes les aubes et tous les crépuscules
en elle tous les instants, depuis le premier,
depuis celui qu’elle a poussé dans le vide
et qui a donné naissance au temps
et dans le temps, à cette parcelle
où la vie a choisi de se déployer.
La vie qui est sa fille bien aimée
à qui elle a confié la tâche insensée
de faire advenir l’homme et la femme
afin qu’ensemble ils enjambent le vide
entre l’argile et les végétaux,
entre la plante et l’animal
et enfin entre le monde créé, infini
et le monde créateur, aimant à l’infini
où se tient la demeure sans limite de la Toute Vivante.