Marioupol

Publié le par Denis

Comme il est dur de faire la guerre à des frères ! 

Mon avion est encore haut dans le ciel,
au dessus des nuages, dans la zone des grands vents. 
J’approche de Marioupol, ma cible. 
Je dois appuyer sur le bouton, bientôt ,
cela je le sais. 

Comme il est dur de faire la guerre à des frères

Je suis venu autrefois en vacances dans cette ville.
J’ai lézardé sur sa plage de sable fin,
flâné sur les quais que je vais détruire
La mer, à ses pieds, avait la couleur de l’espoir
elle n’était pas noire

Comme il est sale de faire la guerre à ses frères

Je n’aurais pas dû ouvrir cet écran hier soir.
Le ventre de cette femme me hante. 
Ce ventre rond qu’elle cachait abrite la vie.
Dans le ventre de mon avion, 
Il y a la mort. 

Comme il est vain de faire la guerre à des frères

Mon missile va s’abattre sur une ville
dont les habitants sont prisonniers
Une ville où russes et ukrainiens se marient.
Poutine l’a dit en nous envoyant les bombarder
« Ce sont nos frères. »

Comme c’est lâche de faire la guerre à des frères

Plus j’approche et plus je tremble
Mon avion lui suit sa route, imperturbable, 
La position de la cible est programmée,  
il ne reste qu’à enclencher le processus. 
Je ne vais pas pouvoir.

C’est si dur de faire la guerre à des frères

J’hésite. Je tente de dévier ma route
Le chef d’escadron me rappelle à moi
«  Pas d’état d’âme, nom de Dieu ! »
J’ai toujours été intimidé par sa voix
Il gueule: « la mission ». 

C’est criminel de faire la guerre à des frères

La bombe est partie avec une seconde de retard. 
J’apprendrai qu’elle a atteint le théâtre
où des centaines de personnes étaient réfugiées.
Je ne crois pas que le ventre de la terre
saura m’accueillir comme il accueille ceux de Marioupol.
Je n’ai fait qu’obéir.

Marioupol
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G
Merci Denis pour cet émouvante poétie sur cette guerre si douloureuse . tes mots justes sonnent comme des pansements de douceur; puissent ils être entendus et apaiser cette violence .
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D
Je panse donc je suis ! En m'aidant à comprendre les mots me soulagent des maux. <br /> Merci Isabelle pour ton commentaire.