La valise
S’en aller n’est rien.
C’est se préparer à partir qui est difficile.
Que vais je mettre dans la valise avant le départ. De quoi ai-je besoin ?
Ai-je le bon billet, le bon guide, les devises, les vêtements adaptés ?
Le grand départ, s’en aller pour de bon, c’est autre chose.
Dans la valise du grand départ, il n’y a pas de guide, de vêtements ni de lunettes de soleil.
La valise du grand départ on ne l’emmène pas avec soi, elle reste sur le quai.
Elle n’est pas vide. Il y a dans cette valise toutes les traces de notre passage.
Des traces qui peuvent être utiles aux autres, les guider, leur faciliter la tâche.
Il y a nos paroles que nos enfants garderont en cas de blessure ou de grande joie.
Il y a notre ombre sous laquelle ils ont grandi et qui les a protégés.
Il y a le titre de propriété qui les abritera et quelques biens qu’ils vendront ou qu’ils s’arracheront.
Il y a les fruits de notre imagination, de nos recherches ; des écrits jaunes, bleus, arc en ciel.
Il y a notre sourire qui pourra être partagé, car c’est un sourire qui ne s’épuise pas.
Il y a la force de notre poignée de main, brûlée par toute la chaleur qu’elle a transmise.
Il y a notre humour comme un rire à la surface de l’eau qui a fait naître des ondes de bonheur
Il y a l’espérance, petite sœur sourire présente aux jours sombres comme aux jours gais.
Tout ce petit monde dans la valise qui reste là, interdite de voyage!
Que va-t-il devenir ?
Il va rester enfermé...
A moins qu’un bras ne saisisse la poignée,
Que des doigts ouvrent la serrure
Qu’une main recueille la force des paroles, de l’humour et tous les fruits d’une vie ainsi que la petite sœur espérance
Et ne les conduise au jardin de la mémoire,
Là où les souvenirs nourrissent l’arbre de nos vies
A l’ombre duquel grandissent les jeunes pousses
Qui préparent leur valise, sans le savoir.