Le lavoir
Des siècles de linges maculés de terre, de gras, de sang ont retrouvé leur blancheur dans ses eaux claires. Des siècles de paroles tantôt acerbes, tantôt crues, tantôt consolatrices ont été déversés sous son toit.
Les salissures comme les paroles, il les a emportées au loin dans le faible courant d'eau qui le traverse.
Aucune tour ne le surmonte. Aucunes moulures n'ornent le linteau de sa porte. A l'intérieur, seule la lumière jouant sur les pierres lui tient lieu de décoration. Rien que du fonctionnel!
Et pourtant, ne méritait-il pas le même égard porté aux autres bâtiments du village, lui qui renouvelle les étoffes et les coeurs.
S'il est resté si simple, à l'écart souvent, posé sur un mince ruisseau, c'est qu'il était avant tout le parlement des femmes, dont la parole ne méritait pas les honneurs, comme celle de Monsieur le curé ou de Monsieur le Maire et de son conseil, femmes dont il a été décrété un jour, mais par qui, que le propre et le sale étaient leur affaire.
Bessy sur Cure, le 14 avril 2016
Ma profonde gratitude à Jean, jacquet en 2002, qui a porté à manger à deux pèlerins affamés, Patrick et moi, dans ce village d'où les commerces ont fui, mais pas l'hospitalité.